Début octobre, les membres de MNNQNS (se prononce Mannequins à l’anglaise) envahissaient Paris avec d’autres compères rouennais pour fêter dignement la sortie de leur premier album Body Negative. Ils étaient sur scène à La Maroquinerie pour présenter un disque qu’ils ont fini d’enregistrer il y a maintenant un an. MNNQNS a patiemment attendu pour pouvoir lâcher son premier long format après une série de plusieurs EP. Et la réception est très bonne partout, que cela soit en France ou de l’autre côté de la Manche : "On a attendu parce qu’on voulait que ça soit le bon timing pour l’Angleterre et que ça ne risque pas de faire un flop", explique le chanteur Adrian d’Epinay. Si le groupe s’est construit à Rouen entre les concerts dans les bars au sein d’une nouvelle scène rock indépendante foisonnante, les musiciens de MNNQNS ont en effet toujours un œil rivé sur le Royaume-Uni.
Le groupe s’y est créé lors des études d'Adrian d'Epinay dans la ville galloise de Cardiff en 2014. À l’époque en musicologie, il découvre dans les pubs des dizaines d'artistes intéressants dont certains vont avoir ensuite un certain succès comme Temples. "Cardiff est une étape pour les tourneurs anglais et de nombreux groupes y passent avant d’exploser".
Il est pris dans cette atmosphère propice à la création musicale et se décide à enfin monter un groupe. Après quelques changements dans l’effectif de MNNQNS, ils arrivent en 2016 à la formule actuelle et l’envie est toujours la même : jouer au Royaume-Uni dans cette scène qui leur ressemble tant.
En effet, leur rock acéré et puissant va puiser ses influences non pas dans la vieille garde francophone, mais plutôt de l’autre côté de la Manche et même de l’Atlantique. Ils s’inspirent autant du rock new-yorkais comme Television que de la pop des Beatles ou des Beach Boys.
Ils aiment faire des grands écarts sonores entre la mélodie pop que l’on chantonne et la puissance, le bruit voire la brutalité d’un titre punk. En cela, ils se retrouvent dans un groupe n’ayant a priori rien à voir avec leur univers musical : Death Grips. "Même s’ils font du hip hop, on se retrouve dans ce qu’ils font parce que de base, c’est un groupe de punk. Sans que le résultat soit le même, on se sent proche de ce genre de groupe."
Et la façon dont ils créent leurs titres est aussi dans ce grand écart continuel. Ils commencent généralement par une jolie mélodie pop qu’ils aiment ensuite déconstruire et brutaliser en studio pour la rendre plus complexe et plus noise : "Pour nous, on est un groupe de pop. Et l'on aime amener des éléments plus expérimentaux qui sont moins instantanés pour l’auditeur". Cette volonté de salir les morceaux s’entend notamment sur la voix du chanteur Adrian se noyant souvent dans une tonne d’effets sonores comme sur Double Visions ou Limits of Town.
Et ce travail sonore particulier va rapidement attirer le label indépendant britannique Fat Cat Records qui a notamment fait connaître le groupe islandais Sigur Rós. "On les avait rencontrés déjà depuis plusieurs années. On était en discussion avec eux depuis quelque temps et l'on a signé cette année avec eux. Cette signature, ça découlait de la relation qu’on a pu avoir avec eux."
Pour le groupe, c’est une porte d’entrée pour jouer en Angleterre et découvrir l’industrie musicale anglaise. Ça leur a d’ailleurs permis d’ajouter des dates dans leur tournée de l’autre côté de la Manche : "Tous nos concerts se passent extrêmement bien là-bas, il y a une vraie bienveillance même pour les groupes qui ne sont pas britanniques."
Pourtant malgré leur envie de Royaume-Uni, ils se retrouvent aussi dans la scène indépendante française et plus précisément leur scène régionale à Rouen. MNNQNS a d’ailleurs, avec d’autres groupes rouennais, créé une association pour faire en sorte de développer ces nombreux artistes et groupes à Rouen.
Avec le collectif Soza, ils organisaient des concerts, mais se concentrent maintenant sur la sortie d’album et de compilation notamment sur cassette. "Avec, Soza, j’ai envie de faire vivre cette scène locale qu’on a la chance d’avoir dans notre ville", explique le chanteur de MNNQNS.
Dans le même temps, le groupe garde l’œil fixé sur son avenir et compte préparer des démos pour son nouvel album qu’il souhaite plus radical dans le son. Il veut pouvoir passer d'ambiances très pop à des moments d’expérimentations bruitistes, quitte à ne pas mélanger les deux comme ils l’ont fait sur ce premier long-format.
En vidéo ci-dessous --> MNNQNS - Fall Down