"La Seine Musicale" un équipement unique en Europe

Vingt-cinq ans après la fermeture des usines Renault, l’île Seguin tient sa nouvelle figure de proue. Avec son auditorium en forme d’œuf géant formé par une résille de bois et protégé par une voile de panneaux photovoltaïques qui tourne avec le soleil, "La Seine Musicale" est désormais plus qu’un geste architectural spectaculaire en construction. Ce lieu unique en France entend révolutionner l’offre musicale de l’Ouest parisien. « Dans les Hauts-de-Seine, nous misons sur la culture pour tous. C’est pour cela que notre choix s’est porté sur un grand équipement musical. Parce que la musique est l’art le plus universel, le plus démocratique qui soit" explique le président du conseil départemental, Patrick Devedjian.
 
Pour marquer la porte d’entrée de la Vallée de la culture des Hauts-de-Seine, le Département souhaitait un ouvrage d’art en harmonie avec la Seine. C’est le prix Pritzker 2014, le Nobel d’architecture, Shigeru Ban, associé au Français Jean de Gastines, un duo à qui l’on doit déjà le centre Georges-Pompidou de Metz, qui a imaginé ce vaisseau amiral. Le conseil départemental souhaitait un symbole fort pour cette porte de ville à l’ouest de Paris. Il fallait également s’intégrer dans le plan urbain de Jean Nouvel conçu pour l’ensemble de l’île Seguin et dont la silhouette est linéaire, explique l’architecte japonais. Aussi le bâtiment évoque-t-il l’image d’un grand navire à travers ses solides longs murs de béton et sa grande voile protectrice flottant au-dessus de l’auditorium. Le Département s’est aussi engagé dans ce projet pour satisfaire un besoin de grande salle de spectacle dans l’ouest parisien, souligne Christian Dupuy, vice-président du conseil départemental chargé de la culture. Des études de marché préalables ont montré le besoin en équipements de ce volume.
 
La Seine Musicale se composera de deux salles: un auditorium de 1 150 places assises dédié à la musique classique et non amplifiée et une grande salle de quatre mille à six mille places pour les musiques actuelles. L’équipement comptera également des espaces de répétition et d’enregistrement. Sur un seul et même site, les grandes et petites formations auront la possibilité de répéter un spectacle, de le présenter sur scène et de l’enregistrer. Des conditions que peu, voire aucun équipement en Europe ne propose, précise Patrick Devedjian. Des commerces dédiés à la culture, des cafés et des restaurants complèteront l’ensemble. Enfin, La Seine Musicale accueillera en résidence l’orchestre Insula Orchestra de Laurence Equilbey. Le site sera également un lieu d’enseignement et de formation avec l’installation en son sein de la Maîtrise des Hauts-de-Seine, le chœur d’enfants de l’Opéra de Paris et de l’Académie musicale du contre-ténor Philippe Jaroussky.
 
En complément du travail primordial des conservatoires, nous souhaitons accompagner sur le long terme une cinquantaine de jeunes filles et garçons, jeune public de 7 à 12 ans qui n’a pas nécessairement les moyens financiers et techniques de faire de la musique, explique-t-il. Mais aussi de jeunes adultes fraîchement diplômés, qui souhaitent bénéficier d’un accompagnement pour s’insérer professionnellement dans le domaine de la musique classique, ce n’est qui pas toujours facile de nos jours.
 
La Seine Musicale, au-delà des ensembles présents, sera principalement un lieu d’accueil mais aussi de production et de création, souligne Jean-Luc Choplin, président du comité de programmation et actuel directeur du théâtre du Châtelet. Cet équipement doit être une fête de la musique permanente, la fête de toute les musiques, du rock au baroque pour ne pas installer de barrière, pour que chacun y trouve son compte. Insula Orchestra annonce, de son côté, un programme Schubert, La Création de Haydn mise en scène par la troupe catalane La Fura dels Baus ainsi qu’un festival Mozart Maximum. Nous souhaitons nous adresser aux publics de tous âges, de tous milieux, explique Laurence Equilbey. Nous allons ainsi travailler sur les avant concerts, proposer des after. Au jazz, nous emprunterons l’idée de sets d’une petite heure. Le lieu nous permet toutes les combinaisons possibles, ce qui est formidable.  Novices ou simples curieux, artistes, initiés, amateurs et professionnels, petits et grands, tous pourront se croiser et partager des émotions à La Seine Musicale, insiste Patrick Devedjian.
 
C’est au groupement Tempo-Île Seguin composé de Bouygues Bâtiment Île-de-France, Infravia, Sodexo et TF1 que le Département a choisi de confier la construction, le fonctionnement et l’exploitation de sa cité musicale pour une durée de trente ans. Une première en France pour un lieu culturel. Pourquoi avoir opté pour le contrat public-privé ? Parce que c’est un contrat clair, cohérent et rapide dans la concrétisation de l’ouvrage, explique le président du conseil départemental. À ce jour, le contrat a déjà prouvé la maîtrise des délais et des dépenses, pour un chantier insulaire qui était un vrai défi. La Seine Musicale sera livrée à la fin de l’année après deux ans et demi de travaux. L’ouverture est annoncée fin avril et trois cents événements sont prévus chaque année. Mais il s’agit d’en faire une destination, pas seulement un lieu de concerts, promet Jean-Luc Choplin. 
 
 
Dans la grande salle, on présentera des événements artistiques, par exemple en juin 2017 un festival sud-africain avec l’Opéra de Cape Town, en juillet, la compagnie de danse d’Alvin Ailey avec le festival Les Étés de la Danse, à l’automne, en préfiguration du centenaire de Bernstein, qui sera célébré en 2018, West Side Story. Normal pour l’ouest de Paris, On produira ou créera des spectacles de théâtre musical, des musicals, de tous les continents.
Notre première création sera une comédie musicale coproduite avec l’Opéra de Cape Town donc, Tsotsi, tiré du film de Gavin Hood My name is Tsotsi. Nous avons également des projets avec l’Afrique de l’Ouest, Bollywood, le Brésil…
 
Dans l’auditorium, toutes les formes musicales seront explorées, du classique au jazz, aux collectifs d’artistes ou musiques du monde. Notre promesse pour les concerts est qu’ils soient différents dans le fond et dans la forme, qu’ils s’adressent aux familles, qu’ils nous étonnent. Quelques exemples: Jean-Christophe Spinosi et l’Ensemble Matheus dans un concert de Haendel à Hendrix, dans un concert Rossini et les dessins animés, le Vegetable Orchestra avec son exécution d’œuvres classiques sur instruments légumes, l’Orchestre National d’Île-de-France avec Doctor Atomic de John Adams, des joutes musicales avec Jean-François Zygel, des ciné-concerts, des feuilletons musicaux (style séries TV), des concerts promenades comme les Prom’s de Londres...
 
Il nous faut inventer un modèle économique. En ce qui concerne la musique classique, les deux ensembles résidents qui bénéficient de subventions du Département devront arriver à l’équilibre des dépenses et des recettes. La location de la grande salle à des promoteurs de concerts de rock et de variétés permettra de dégager des recettes dont une partie pourra être investie dans les créations. Pour la création ou la production de nos événements, nous serons en coproduction, en partenariat avec de nombreux producteurs internationaux, privés ou publics, théâtres, institutions (comme l’Opéra de Cape Town pour Tsotsi), partenaires media, télévisions, dans un modèle très West End ou Broadway. La nécessité sera mère de l’invention.
La Seine Musicale ouvrira ses portes en avril 2017.
 
En vidéo ci-dessous --> Présentation de la Seine Musicale par Patrick Devedjian et Jean-Luc Choplin