Il n'était plus apparu en public depuis 2007. Michel Polnareff, 70 ans, a inauguré samedi 20 juin, devant 2000 fans en délire, une rétrospective consacrée à sa carrière et ses tubes immortels au Musée des musiques populaires (MuPop) de Montluçon. La sous-préfecture de l'Allier (40.000 habitants), où l'interprète d'"On ira tous au paradis" a passé une partie de son service militaire dont six mois au "trou", lui a aussi dédié une place à son nom, inaugurée pour l'occasion par le chanteur. "C'est très émouvant de voir la fidélité du public, qui n'a d'égale que la mienne à son égard", a déclaré le chanteur à la presse, accompagné de sa compagne et de son fils.
"Michel Polnareff, c'est vraiment l'archétype de la pop star française. Il reste deux énormes vedettes en France: Johnny Hallyday et lui", assure le commissaire de l'exposition, Eric Bourgougnon.
Costumes de scènes en lamé argenté ou simili cuir noir rehaussé de bordures de perles, pochettes de disques, partitions originales et instruments de musique... sur 400 mètres carrés, cette "Polnaexpo" (du 21 juin au 31 décembre 2015) offre au regard du visiteur près de 150 pièces provenant des archives personnelles de l'artiste ou de son entourage. "Polnareff est assez inclassable. Il débarque à l'époque des yé-yé avec son style à lui, qui est un métissage entre de sa grande culture musicale classique et l'influences de la pop anglaise et américaine qu'il découvre lors de voyages linguistiques", souligne le conservateur du MuPop.
Parmi ses objets fétiches figurent notamment ses quatre paires de lunettes aux verres fumés, deux noires et deux blanches, derrière lesquelles il s'est construit un personnage, maintes fois parodié, avec ses cheveux blonds peroxydés.
Et en attendant son nouvel album prévu en 2015, les inconditionnels de l'artiste pourront également revoir dans une boîte noire baptisée "PolnaLive" plus de quarante minutes de ses concerts mythiques, de 1967 à 2007, date de ses derniers spectacles à Paris Bercy et à la Tour Eiffel.
Anticonformiste, l'artiste aime provoquer. Son titre L'amour avec toi (1966) choque la France d'avant 68 et se retrouve interdit à la diffusion avant 22h. A contre-courant de la mode de l'époque, il compose Le bal des Laze (1968), mêlant l'orgue à la basse, qui sera un succès. Mais c'est avec son affiche "PolnaRévolution" sur laquelle il montre ses fesses que naît le scandale, comme le rappelle un micro-trottoir filmé dans les rues de Paris en octobre 1972. "L'affiche lui vaudra un condamnation mais ce fut un beau coup de pub pour ses concerts à l'Olympia", souligne Eric Bourgougnon.
L'homme est aussi excentrique: il achète une moto Harley Davidson (exposée pour l'occasion) identique de celle d'Elvis Presley, qu'il conduit dans son salon. Largement consacrée à la période 1966-1973, "la plus talentueuse et prolifique", cette rétrospective retrace également la suite de sa carrière aux Etats-Unis, où il s'est exilé après avoir été escroqué par son homme de confiance.
"C'est l'époque de "Lettre à France", puis de l'album "Kâmâ Sutrâ", aux sons plus américains, plus électroniques", continue Eric Bourgougnon, qui a rencontré l'artiste pour finaliser le projet.
Ce "virtuose du piano", capable de mêler à ses compositions pop des partitions de Mozart, Chopin ou Debussy, composa également des musiques de films, illustrés par d'innombrables affiches, comme celles de "La folie des grandeurs" (1971), "la Vengeance du Serpent à plumes" (1984) de Gérard Oury ou de "Ça n'arrive qu'aux autres" (1971) de Nadine Trintignant.